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L’entretien du mois : Pétronille Rostagnat

Petronille Rostagnat

Pétronille Rostagnat est venue au Festival Sans Nom l’année où elle a été remarquée et appréciée pour sa bonne humeur et son entrain. Elle est de retour en 2021 avec un nouveau roman « Je pensais t’épargner » (Marabout Black Lab) et avec un nouveau statut. En effet, elle est une auteure dont la notoriété et le succès ne cessent de croître.
Retour sur son parcours et quelques secrets d’écriture.

Comment passe-t-on de spécialiste en marketing relation clients à auteure de polar ?

Devenir romancière a été un long cheminement. Dix ans de vie professionnelle en marketing ne s’effacent pas en un tour de main. Mon parcours littéraire a débuté en 2014, au cours d’une deuxième expatriation à Dubaï. À l’époque, responsable marketing au sein d’un groupe français, je ressens le besoin de me réaliser dans un projet plus personnel et artistique. J’écris alors La fée noire, mon premier roman. Il me faudra douze mois pour écrire le mot FIN et encore une année pour le faire lire à mon entourage. D’abord auto-édité, le livre sortira en librairie en juin 2016. Un autre roman suivra l’année suivante. De retour en France, je me lance dans une recherche d’emploi en marketing, incapable de me représenter comme une auteure. Le fameux syndrome de l’imposteur ! Lors d’un entretien, je réalise que ma place n’est plus dans le milieu de l’entreprise, mais derrière mon écran à écrire des romans. Ce jour-là, j’ai eu un déclic. J’ai stoppé ma recherche d’emploi et j’ai changé mon profil sur LinkedIn. Ma nouvelle vie commençait !

Des personnages deviennent récurrents, Alexane Laroche et Pauline Carel. C’est un plaisir de développer leurs histoires et leurs personnalités ? Souvent les écrivains disent que leurs personnages ont leurs propres vies. Est-ce le cas des tiens ?

J’ai écrit quatre romans avec Alexane Laroche et deux romans avec Pauline Carel. C’est toujours un plaisir de les retrouver et toujours difficile de les quitter. Elles font partie de moi. Mes héroïnes font des choses que je n’oserais jamais faire dans la vie, et cela m’amuse énormément. À travers elles, je me permets tellement de choses. C’est un exutoire et une véritable jouissance de pouvoir jouer avec ses interdits. Dans ce sens, elles ont leurs propres vies, c’est certain !

Question classique pour un écrivain : ces personnages te ressemblent-ils ?

Je mentirais si je disais que mes deux héroïnes ne me ressemblent pas. Alexane et Pauline sont diamétralement opposées, et pourtant, elles représentent chacune une part de ma personnalité. Alexane est une femme flic bien dans ses baskets qui recherche l’équilibre entre sa vie professionnelle et sa vie personnelle. Malgré un travail prenant et difficile, il est important pour elle d’avoir des moments privilégiés avec ses deux garçons et son mari. Maman de trois enfants, ma famille reste ma priorité. Je me consacre à mon métier d’écrivain quand tout le monde est à l’école et oublie mon ordinateur une fois que la cloche sonne à 16 h 30. Pauline est une avocate organisée, exigeante avec elle-même, remplie de doutes. Je me reconnais en elle sur ces points. Je ne suis jamais complètement satisfaite de mes romans et j’ai besoin d’être rassurée en permanence.

Ton dernier roman commence avec la découverte d’un cadavre d’enfant. Comment la femme et la mère de famille font-elles la part des choses avec l’auteure ?

Je ne me pensais pas capable d’écrire sur un tel sujet et je me l’interdisais jusqu’à présent. La lecture d’un témoignage sur les violences intrafamiliales m’a secoué, et écrire sur ce thème est devenu alors une évidence. J’ai fait sauter mes barrières et je me suis mise à écrire. Je pense pour autant que le lecteur ressent une certaine pudeur encore dans ce roman. Les scènes de violences ne sont pas poussées à l’extrême, laissant une place à l’imaginaire. Le lecteur lit entre les lignes et c’est amplement suffisant. Il m’est arrivé de pleurer en écrivant certains chapitres et de serrer fort mes enfants après des séances d’écriture. Je voulais témoigner sur ce sujet et je ne regrette pas ce choix aujourd’hui. Là, je commence un roman qui aborde la prostitution chez les mineurs. En tant que maman, je découvre cet univers et j’en suis profondément attristée. Comprendre comment via les réseaux sociaux des jeunes adolescentes en viennent à se prostituer, m’oblige à ouvrir les yeux sur ce phénomène en tant que mère et à aborder ce sujet avec mes enfants.

Comment construis-tu ton histoire ? Tu connais la fin au début de l’écriture ? Il y a un thème spécifique que tu veux développer ?

Pour mes premiers romans, j’écrivais à l’instinct, avec mes tripes. J’avais le premier chapitre, une idée générale de là où je voulais aller et je me lançais dans l’écriture portée par l’inspiration du moment. Après trois romans, ma démarche a évolué et est devenue plus structurée. Maintenant, je choisis un thème bien spécifique que je souhaite aborder. J’effectue ensuite de nombreuses recherches sur le sujet pour m’approprier l’univers, le vocabulaire de la situation, identifier les protagonistes clefs qui devront apparaître dans l’histoire. Quand je me sens suffisamment nourrie, je m’installe derrière mon ordinateur et j’écris.

Le succès est grandissant et les sollicitations de plus en plus nombreuses. Comment vis-tu cette notoriété grandissante ?

C’est un véritable plaisir de sentir que le retour des lecteurs est de plus en plus enthousiaste. Mon écriture change, mes histoires touchent plus de personnes, et cela m’encourage à continuer. C’est toujours un beau cadeau quand je reçois un message enjoué d’un lecteur. Maintenant, il me reste encore beaucoup de travail et de marches à monter !

Dans un mois, tu reviendras à Mulhouse, as-tu un message pour nos festivaliers ?

Je suis venue à Mulhouse pour la première fois l’année dernière dans le cadre du festival. J’étais une jeune auteure inconnue et l’accueil du public a été chaleureux. Cela a été l’occasion de faire de jolies rencontres. J’ai hâte de retrouver les lecteurs qui m’ont reçu les deux bras grands ouverts.

Entretien réalisé par Hervé Weill

 

 

 

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